En novembre 2008 se tenait le calamiteux congrès de Reims, centré sur la personnalité de Ségolène Royal. Grâce à un rapprochement des contraires (de Hamon à Delanoë) puis un micmac lors du vote des militants, la candidature de celle-ci au poste de première secrétaire avait été écartée. Un an plus tard, la même Royal fait reparler d'elle en perturbant une rencontre plurielle sur l'éducation à Dijon. Inutile derevenir sur l'impasse p
olitique que représente l'ancienne candidate à la présidentielle (voir une note précédente). Les critiques de Vincent Peillon concernant son ancienne « patronne » résument assez bien les reproches qui sont adressés à Ségolène Royal : trop personnelle, trop imprévisible et pas assez travailleuse. Il est cependant curieux qu'il ait mis autant de temps à se rendre compte de ces carences...
Cette prise de bec serait finalement assez anecdotique si le PS affichait par ailleurs une bonne santé. Tel n'est pas le cas. Les seuls débats qui aient avancé en douze mois concernent le non-cumul des mandats (mais les barons ne veulent rien lâcher là-dessus) et l'organisation des primaires (qui, paradoxalement, pourraient encore plus désintégrer le PS). Commentant la querelle Royal-Peillon, Martine Aubry a dit préférer le PS qui travaille. De quoi parle-t-elle exactement? Car le PS qui travaille, on le cherche en vain. Une convention sur l'entreprise qui devait avoir lieu cet automne a été reportée à l'après-régionales. Sur la lutte contre le réchauffement climatique, sur la protection des travailleurs face à la montée du stress, sur la régularisation des sans-papiers, sur la montée de la misère... on attend en vain des contre-propositions audacieuses et chiffrées.
Le seul domaine où le PS semble en pointe, c'est la défense des collectivités locales menacées par les divers projets de l'exécutif. La mobilisation des élus lors du congrès de l'AMF montre la force de frappe du PS en la matière. Un parti inaudible sur les questions de société et économiques, mais arc-bouté sur la défense de ses fiefs... cela rappelle furieusement la SFIO vieillissante des années 60.
Pendant ce temps-là, une formation engrange des soutiens et des ralliements. Emmenée par une remarquable Cécile Duflot,
Europe écologie (et dans une moindre mesure le Parti de la Gauche) paraît en mesure de drainer les millions de déçus du PS. Dynamisée par son succès aux européennes, Europe écologie élargit progressivement son assise en récupérant des cadres socialistes déçus par la passivité de leur parti. C'est le cas d'Eric Loiselet, l'un des animateurs du Pôle écologiste (l'une des seules nouveautés du dernier congrès) et de Pierre Larrouturou qui a tenté en vain de déposer une motion à Reims (et qui s'est rallié en désespoir de cause à Benoit Hamon, lequel a très vite oublié ses soutiens de congrès...). Ceux qui tentent de faire bouger la doctrine et les pratiques de ce parti en le faisant sortir de ses ambiguïtés permanentes baissent les bras ou choisissent un autre chemin politique. Restent dans l'appareil ceux qui sont obsédés par la conquête du pouvoir, misant d'ailleurs plus sur 2017 que sur 2012.
Les prochaines élections régionales risquent d'être marquées par une déconfiture du parti socialiste. La bonne qualité des candidats sur le terrain, le bilan plutôt bon des exécutifs régionaux ne pourront éternellement masquer l'état de déshérence politique du parti socialiste.

e socialiste, elle, divise profondément l'électorat de gauche. Chacun connaît, dans son entourage, une personne de gauche qui serait prête à se faire moine pour qu'elle se représente en 2012 et une autre qui clame haut et fort qu'elle préfèrerait voter blanc que de mettre un bulletin Ségolène Royal. Parmi les commentaires qui peuvent être lus sur Rue89 (la plupart portent sur le coût prohibitif de ce site et son design jugé ringard), deux, fort contrastés, résument l'extrême polarisation autour de Royal. Côté défense : « Plus la femme politique est attirante sexuellement, plus cette haine se fera globale et totale. » Côté accusation: « Si elle n'a pas le recul nécessaire pour voir qu'un simple site créé à la va-vite avec un budget exorbitant peut s'avérer catastrophique, qu'en aurait-il été de la conduite d'une nation ? »
opinion publique, notamment à gauche? Dans un livre passionnant publié en 2005, Madame Royal (éditions Jacob-Duvernet), le journaliste Daniel Bernard écrivait justement: « Ségolène Royal colle à la France d'aujourd'hui, c'est-à-dire à ses contradictions. En quatre mots répétés à satiété - « en même temps » - elle dit tout des hésitations françaises. […] Oui au mariage gay et « en même temps » oui aux « familles au carré ». Pour le maintien des bureaux de poste et des écoles en zone rurale « et en même temps » contre les augmentations d'impôts. […] Ségolène veut tout à l'image de la société française des années 2000. »
A deux semaines de l'élection des députés européens, tout l'appareil socialiste est aux abois. Non seulement – si on se réfère aux sondages – le PS a toutes les chances d'être loin derrière les listes présentées par l'UMP, mais il pourrait être en-dessous de la barre symbolique des 20 %. La situation politique est totalement paradoxale : le gouvernement multiplie les mécontentements (université, services publics, syndicats...), la France est entrée dans une phase de récession qui pourrait durer plusieurs mois, la côte de popularité du Président de la République est au plus bas... mais le principal parti d'opposition ne parvient pas à engranger les fruits politiques d'une conjoncture qui théoriquement lui offrirait un boulevard.